Revue d’actualité – Juin 2024
Avant-propos
Nous avons le plaisir de vous présenter le 12ème numéro de la revue d’actualité de l’O-CR. Ce numéro rapporte une sélection non exhaustive de faits marquants des deux derniers mois survenus dans les camps de réfugié·e·s de cinq zones du monde: Europe, Amériques, Asie, Afrique, et Afrique du Nord Moyen-Orient.
Ainsi, nous vous invitons à nous suivre pour un tour d’horizon des faits d’actualités survenus :
En Europe, Paris accueille cet été les Jeux olympiques et paralympique 2024, et souhaite à cette occasion présenter une image dénuée de certaines réalités sociales de la capitale, en évacuant et déplaçant des personnes emcampées vers d’autres régions de France. En Asie, les conséquences de la fuite de la communauté Rohingya, persécutée en Birmanie, vers les pays alentours sont toujours visibles. En zone Amériques, plusieurs camps font face à l’émergence de trafics et de violences qui accentuent les vulnérabilités et la précarité de beaucoup.
En Afrique, plusieurs initiatives émergent dans des camps au Kenya par exemple, tandis que la guerre au Soudan se poursuit tout en affectant les pays voisins tel que le Tchad. Enfin, au Moyen-Orient, il est sans redire que la région est devenue complètement instable, les personnes réfugiées, notamment syriennes et palestiniennes, sont encore une fois en position d’extrême précarité face à la diminution des aides financières au niveau international et aux mesures de plus en plus restrictives à leur égard au niveau national.
Sara TRABI et Amel CHIGUER, Co-responsables éditoriales
Dans ce numéro:
Zone Europe
- France. Des politiques d’extrême droite dénoncent, à tort, l’installation d’un camp de réfugié·e·s au sein d’un château en Yvelines.
- Albanie. Deux centres de rétention italiens sont en cours de construction en Albanie.
- Grèce. Le ministère grec de l’Immigration condamné pour violation de la protection des données dans des camps de migrant·e·s.
- France. Le collectif des Jeunes du Parc de Belleville menacé d’expulsion de la Maison des Métallos.
- France. L’État expulse les exilé·e·s les plus démuni·e·s vers les régions pour désengorger l’hébergement d’urgence francilien et préparer les JOP 2024.
Zone Asie Pacifique
- Inde. La Haute Cour de Madras rejette la citoyenneté indienne pour les enfants nés dans les camps de réfugié·e·s tamouls du Sri Lanka.
- Bangladesh. Love Army: où es-tu Jérôme : ce que montre le documentaire de Cox’s Bazar.
- Indonésie. Augmentation des arrivées d’enfants Rohingyas en Indonésie: un désespoir croissant.
- Bangladesh. L’insécurité en augmentation croissante dans les camps de réfugié·e·s rohingyas.
- Australie. Expérience interactive : vivre comme un·e réfugié·e en Australie.
Zone Amériques
- Mexique. Augmentation des violences sexuelles à l’encontre des personnes migrantes .
- Colombie. Necoclí et Turbo, les points de départ de la traversée du Darién.
- Panama. Démantèlement de deux campements liés au trafic de migrant·e·s.
Zone Afrique
- Kenya. Kenya – Le football comme outil d’intégration dans le camp de Kakuma.
- Tchad. Tchad/Soudan : Guerre au Soudan, crise humanitaire au Tchad.
- Kenya. Kenya – Kakuma, un écosystème entrepreneurial vert porté par les réfugié·e·s.
- Ouganda. La Banque de développement allemande finance une nouvelle installation sanitaire dans le camp de Rhino en Ouganda.
Zone Afrique du Nord/Moyen-Orient
- Jordanie. Qu’advient-il des habitant·e·s de Zaatari depuis la diminution de leur assistance ?
- Liban. El País réalise un reportage inédit sur le camp de Ein el-Hilweh au Liban.
- Liban. Un incendie ravage le camp syrien de Hamed el-Hassan.
- Cisjordanie. Raid israélien meurtrier dans le camp cisjordanien de Nour Chams.
- Syrie/Irak. Plus de 750 Irakien·ne·s du camp syrien d’Al Hol rapatrié·e·s en Irak.
- Irak. L’Irak ferme l’ensemble de ses camps, à marche forcée.
| 09/03/2024
Des politiques d’extrême droite dénoncent, à tort, l’installation d’un camp de réfugié·e·s au sein d’un château en Yvelines
France. Des résidences étudiantes abandonnées près d’un château dans les Yvelines ont permis d’héberger temporairement des réfugié·e·s ayant obtenu l’asile en France. Des partis d’extrême droite, dont Reconquête et le Rassemblement national (RN), ont délibérément déformé les faits afin de créer une controverse. Marion Maréchal Le Pen affirme sur les médias que le château des Yvelines est transformé en « camp de migrants africains ». En réalité, 195 personnes, principalement des familles du Burundi, du Soudan, de République démocratique du Congo et du Rwanda, ont été accueillies temporairement dans ces anciennes résidences désaffectées, et non pas au sein du château. Quelques dizaines de militant·e·s d’extrême droite ont également manifesté sur le site, déployant des banderoles et scandant des slogans racistes. Malgré les critiques, cette opération a été saluée comme exemplaire par certains. En effet, le directeur d’Emmaüs Solidarité, chargé de leur prise en charge, a souligné les conditions d’accueil dignes offertes aux réfugié·e·s durant cette attente d’accès au logement, tandis que l’ancien préfet des Yvelines a rappelé le devoir d’accueil envers ces personnes réfugié·e·s. Ils ont depuis été répartis sur différents sites en province.
- « Quand l’extrême droite dénonce, au mépris de la réalité, l’installation d’un « camp de migrants » dans un château », publié le 09/03/2024 par Le Monde (quotidien français généraliste)
| 31/03/2024
Deux centres de rétention italiens sont en cours de construction en Albanie
Albanie. L’accord de délocalisation de l’accueil des personnes migrantes secourues en mer passé entre l’Italie et l’Albanie se concrétise. En effet, la construction de deux centres de rétention dans les villes de Shengjin et Gjader a été lancée le 31 mars dernier. Le projet prévoit que le centre de Shengjin, situé aux abords du port de la ville, sera chargé des procédures de débarquement et d’identification. Le centre de Gjader devrait quant à lui permettre d’opérer les procédures ultérieures telles que le traitement des demandes d’asile ou l’éloignement des personnes. Près de 750 millions d’euros ont été investis dans ce projet qui devrait permettre à l’Italie de se délester d’une part significative de ses arrivées. Selon les prévisions, les deux centres devraient accueillir temporairement 39 000 personnes par an, tandis que l’Italie compte déjà 145 000 arrivées depuis le mois de janvier 2024. La déportation des personnes vers l’Albanie a pour but de contourner le principe de non-refoulement qui implique un droit pour les personnes de se maintenir sur le territoire pendant le traitement de leur demande de protection internationale. Matteo de Bellis, chercheur sur les questions migratoires et d’asile à Amnesty International, souligne également que le recours automatique à la détention constitue une mesure arbitraire et est par conséquent illégal. L’externalisation des contrôles migratoires par l’Italie vers un pays non-membre de l’UE ne lui permettra toutefois pas de se soustraire au contrôle de la Cour européenne des droits de l’Homme. Si la Cour ne s’est encore jamais prononcée sur la validité d’un tel accord, elle a, par un arrêt du 15 juin 2022 K.N. c. Royaume-Uni, rappelé que les droits fondamentaux des personnes continuent de s’appliquer.
- « Albanie : des centres de rétention de migrants secourus dans les eaux italiennes en construction », publié le 31/03/2024 par TV5 Monde (plateforme d’information de la chaine généraliste internationale française)
| 03/04/2024
Le ministère grec de l’Immigration condamné pour violation de la protection des données dans des camps de migrant·e·s
Grèce. L’autorité indépendante grecque de protection des données a annoncé la condamnation du ministère grec de l’Immigration à une amende de 175 000 euros pour violation de la protection des données au sein des camps grecs de migrant·e·s. Cette condamnation fait suite à une enquête sur les dispositifs déployés par l’Etat grec au sein des camps de migrant·e·s. L’Autorité grecque de protection des données, institution indépendante du pays, a déclaré avoir noté des graves lacunes dans le respect des règles de protection des données. De nombreux outils utilisés dans ces camps, comme les caméras de surveillance, de machines à rayons X, ou encore de système d’analyses comportementales à intelligence artificielle, sont régulièrement critiqués par des groupes de défense de droits humains. Le ministère grec dispose, selon l’autorité de protection des données, d’un délai de trois mois pour se remettre en conformité avec les règles.
- « Protection des données dans les camps de migrants : en Grèce, un ministère mis à l’amende », publié le 03/04/2024 par L’Orient-le-Jour (quotidien francophone libanais)
| 10/04/2024
Le collectif des Jeunes du Parc de Belleville menacé d’expulsion de la Maison des Métallos
France. Depuis le 6 avril, un collectif de 250 “Mineur·e·s Non Accompagné·e·s” (MNA), s’est organisé pour occuper l’établissement culturel du 11ème arrondissement, et transformer le lieu en “Maison des luttes”. Ces jeunes attirent l’attention de la ville de Paris et de l’Etat sur leur situation, encore davantage fragilisée par l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques. La mairie déplore quant à elle l’inaction de l’Etat en matière de régularisation et d’hébergement des MNA. Le collectif, appuyé par une enquête menée par la Coordination Nationale Jeunes Exilés en Danger (CNJED), dénonce une première évaluation expéditive de la minorité et de l’isolement des MNA, aboutissant à un refus de prise en charge quasi systématique (77%) de la part de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). Beaucoup se trouvent alors en situation d’errance, exposé·e·s aux dangers multiples de la rue, et aggravant inévitablement leur état de santé physique et mental. Parmi les jeunes qui persévèrent en demandant un recours de la décision, 60% sont reconnu·e·s mineur·e·s isolé·e·s, une fois leur dossier étudié par un·e juge pour enfant. Le collectif demande la prise en compte du principe de “présomption de minorité” qui leur permettrait d’accéder à l’éducation et à un logement digne, leur épargnant ainsi cette longue période de vulnérabilité pendant la procédure de recours qui dure entre 3 et 6 mois. Les Jeunes de Belleville et leurs soutiens militent également pour alerter l’opinion publique sur une situation qui s’inscrit au croisement de sujets sociétaux de première actualité tels que la protection de l’enfance, la perception de l’immigration en France et l’impact social des jeux olympiques de Paris sur les grand·e·s exclu·e·s.
- « Occupation de la Maison des Métallos par des migrants à Paris », publié le 10/04/2024 par France Info (média public d’information française)
- « France: l’errance des mineurs isolés étrangers cherchant à faire reconnaître leur minorité », publié le 10/04/2024 par RFI (média français d’information sur l’actualité mondiale)
- « Mineur·es non accompagné·es refusé·es ou en recours de minorité : recensement national du 20/03/2024 », publié le 20/03/2024 par Utopia 56 (association de mobilisation pour les exilé·es)
| 11/04/2024
L’État expulse les plus démuni·e·s vers les régions pour désengorger l’hébergement d’urgence francilien et préparer les JOP 2024
France. A l’approche des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, les forces de l’ordre font place nette autour des sites de la compétition, exacerbant la précarité des plus vulnérables, exilé·e·s pour la plupart. Celles et ceux qui vivent dans les rues et les parcs, ou dans des abris de fortune en Ile-de-France, sont délogé·e·s et expulsé·e·s vers les régions. Le Revers de la Médaille – collectif de 80 associations de terrain dédié à la collecte d’informations et au plaidoyer -, dénonce une chasse aux “indésirables”, un “nettoyage social” pour présenter aux 15 millions de visiteur·se·s attendu·e·s et aux téléspectateur·ice·s du monde entier, une vision fantasmée de la ville lumière, au détriment des réalités sociales.
Les camps informels franciliens sont démantelés un à un. Le 17 avril dernier, c’est le plus grand squat de France situé dans des locaux désaffectés à Ivry-sur-Seine, où vivaient environ 450 exilé·e·s (dont 20 enfants et 50 femmes), qui était visé. A 100 jours de l’événement sportif, près de 300 résident·e·s ont été évacué·e·s, réorienté·e·s vers des sas d’accueil temporaires en région, en rupture avec leurs repères administratifs, sociaux, médicaux développés à Paris. 150 personnes seraient parties la veille de l’évacuation. Selon l’association United Migrants, 80% de ces déplacé·e·s sont en situation régulière, mais sans accès au logement, y compris des salarié·e·s en CDI depuis plusieurs années. Beaucoup choisissent de garder leur emploi, quitte à dormir dehors, plutôt que de partir et risquer de tout perdre. Le gouvernement défend que le dispositif de sas régionaux a pour vocation de désengorger l’hébergement d’urgence en Ile-de-France. Paul Alauzy, coordinateur à Médecins du Monde, souligne que passées les trois semaines offertes par le sas, nombreux sont les retours à la rue, faute de solutions pérennes. Certain·e·s déplacé·e·s retournent alors à Paris par leurs propres moyens, illustrant l’inefficacité de cette mesure.
- « Avant les JO de Paris, des associations dénoncent un « nettoyage social », les autorités démentent vouloir « cacher la misère », publié le 11/04/2024 par Le Monde (quotidien français généraliste)
- « A Vitry-sur-Seine, le plus grand squat de France évacué, à cent jours des Jeux olympiques », publié le 17/04/2024 par Le Monde (quotidien français généraliste)
- « French police evict hundreds from abandoned Paris warehouse ahead of Olympics », publié le 18/04/2024 par The Associated Press (agence de presse coopérative américaine)
| 14/03/2024
La Haute Cour de Madras rejette la citoyenneté indienne pour les enfants nés dans les camps de réfugié·e·s tamouls du Sri Lanka
Inde. La Haute Cour de Madras a refusé d’ordonner l’octroi automatique de la citoyenneté indienne à tous les enfants nés dans les camps de réfugié·e·s tamouls du Sri Lanka au Tamil Nadu le 14 mars 2024. Les juges Sanjay V. Gangapurwala et D. Bharatha Chakravarthy ont déclaré que la demande manquait de détails essentiels, comme les dates et lieux de naissance, et la citoyenneté des parents. Initialement, c’est V. Ravikumar, avocat à Chennai, qui avait déposé cette requête en septembre 2022 auprès de la Commission nationale des droits de l’homme (NHRC) à quoi le ministère de l’Intérieur avait répondu que la citoyenneté de naissance ne pouvait pas être automatiquement accordée aux enfants nés dans ces camps.
Historiquement, la citoyenneté indienne avait été accordée aux Tamouls d’origine indienne sous les accords Sirimavo-Shastri (1964) et Sirimavo-Gandhi (1974). Aujourd’hui, le ministère a précisé que toute personne entrée en Inde sans documents valides est considérée comme un·e migrant·e illégal·e selon la loi sur la citoyenneté. Les conditions pour obtenir la citoyenneté par naissance ont été renforcées : depuis cette date, un·e enfant né·e en Inde ne peut être citoyen de naissance que si l’un de ses parents est citoyen·ne indien·ne. L’amendement de 2003 a ajouté que si un parent est migrant·e illégal·e, l’enfant ne peut revendiquer la citoyenneté de naissance.
- « Madras High Court rejects plea to grant Indian citizenship to children born at Sri Lankan Tamil refugee camps », publié le 14/03/2024 par Save The Children (ONG visant à la défense du droit des enfants à travers le monde)
| 20/03/2024
Love Army – Où es-tu Jérôme : ce que montre le documentaire de Cox’s Bazar
Bangladesh. Depuis le 20 mars dernier, le documentaire Love Army : où es-tu Jérôme, réalisé par le rapporter Charles Villa, est disponible sur Prime Video. Tout au long des cinq épisodes, le spectateur est plongé au cœur du travail humanitaire, aux côtés de l’influenceur Jérôme Jarre, qui s’est fait connaître sur Vine et a décidé d’utiliser son influence au service de grandes causes.
En novembre 2017, face à la détresse des Rohingyas installés en masse dans des camps de réfugié·e·s au Bangladesh, il a lancé la campagne de dons “Love Army pour les réfugiés Rohingyas” et a mobilisé des artistes et des personnalités d’internet comme Omar Sy, DJ Snake ou encore Mister ou Seb (liste non-exhaustive). A travers le documentaire de Charles Villa, de nombreuses images du camp de Cox’s Bazar, le plus grand camp de réfugié·e·s du monde, sont disponibles. Les conditions de vie dans lesquelles vivent les réfugié·e·s de ce camp sont montrées sans artifices et permettent de prendre la mesure de l’urgence humanitaire et sanitaire. Sur plusieurs kilomètres, les abris en tôle se succèdent et les files d’attente pour obtenir une petite ration de nourriture sont quotidiennes. Si Jérôme Jarre avait réussi à lever plus de deux millions de dollars pour aider les Rohingyas, les résultats concrets de cet argent dans le camp ne sont pas si visibles. Pensant révolutionner l’humanitaire, Jérôme Jarre partait convaincu que l’argent pouvait être directement distribué aux populations, sans avoir à passer par des associations ou des ONGs. Or, cela n’a en fait pas pu être le cas, puisque la distribution de l’argent doit être pensée de façon à obtenir des résultats probants sur du long terme et surtout pour que le public ciblé puisse en bénéficier. Un des concepts fondamentaux dans l’action humanitaire est de ne pas faire plus de mal aux populations qu’elles n’en ont déjà reçues. Concrètement, le documentaire montre bien comment la Love Army a failli à ce principe, en promettant la construction d’écoles, d’hôpitaux, allant jusqu’à l’achat d’une île pour la population rohingya … Love Army : où es-tu Jérôme est édifiant pour comprendre la détresse dans laquelle sont les réfugié·e·s rohingyas, n’ayant pas de pays et étant fortement discriminés. Actuellement, les conditions de vie des camps de Cox’s bazar restent alarmantes d’un point de vue humanitaire et sanitaire, alors que plus d’un million de personnes s’y trouvent.
- « Love Army, où es-tu Jérôme », publié le 20/03/2024 par Charles Villa disponible sur Prime Video (Plateforme de vidéos à la demande créée par Amazon)
| 21/03/2024
Augmentation des arrivées d’enfants Rohingyas en Indonésie: un désespoir croissant
Indonésie. Depuis fin 2023, environ 250 enfants Rohingyas non accompagné·e·s sont arrivé·e·s en Indonésie. L’année dernière, environ 4 500 réfugié·e·s Rohingyas ont entrepris des voyages maritimes périlleux, en quête de sécurité et de meilleures opportunités. Parmi eux, 37 % étaient des enfants, exposé·e·s à des risques accrus de traite, de violence et d’exploitation. Les familles Rohingyas, confrontées à des conditions de vie de plus en plus précaires dans les camps au Bangladesh, se voient contraintes de tenter leur chance par la mer. Fatima, mère de trois enfants, cite l’absence d’opportunités d’emploi et d’éducation comme raisons principales de leur fuite. « Je veux que mes enfants vivent en sécurité et puissent apprendre », dit-elle. Les Rohingyas n’ont pas de moyens légaux pour se déplacer. Ils·Elles sont souvent contraint·e·s de recourir à des passeurs pour leurs dangereux voyages. L’Indonésie, bien que non signataire de la Convention des Nations Unies relative aux réfugié·e·s, accueille ces réfugiés·e·s malgré les tensions croissantes et les violences motivées par la désinformation. Dessy Kurwiany Ukar, PDG par intérim de Save the Children Indonésie, souligne l’urgence de la situation: « Le gouvernement indonésien doit continuer à autoriser le débarquement des bateaux et à soutenir les réfugié·e·s Rohingyas. D’autres pays de la région doivent aussi partager cette responsabilité. » La crise Rohingya reste un défi humanitaire majeur, nécessitant une réponse collective pour offrir un avenir meilleur aux enfants et à leurs familles.
- « Spike in arrivals of unaccompanied Rohingya children in Indonesia highlights increasing desperation », publié le 21/03/2024 par Save The Children (ONG visant à la défense du droit des enfants à travers le monde)
| 30/03/2024
L’insécurité en augmentation croissante dans les camps de réfugié·e·s rohingyas.
Bangladesh. Une des raisons pour lesquelles les associations et les ONGs ont un rôle majeur au sein des camps de réfugié·e·s rohingyas est la présence de gangs armés et de groupes criminels. Si les campagnes de dons étaient reversées directement à la population, il est fortement probable que l’argent bénéficierait surtout aux groupes armés et au trafic en tout genre plutôt qu’à l’ensemble des Rohingyas. Là où la vulnérabilité est la plus grande, certains décident en effet de rallier des groupes pour mieux se défendre et obtenir les ressources dont ils ont besoin pour (sur)vivre dans les camps de réfugié·e·s. C’est un réel gouvernement “de la nuit” qui s’est créé dans les camps, luttant pour obtenir le contrôle du camp où ils opèrent, aux heures les plus tardives. Le représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés au Bangladesh, Sumbul Rvzi, a d’ailleurs déclaré que la sécurité était devenu l’enjeu majeur des camps. En effet, les chiffres sont plutôt inquiétants : des médecins travaillant dans le camp ont affirmé que le nombre de blessures par balle a grandement augmenté, de même que le nombre de meurtres qui y sont commis, ainsi que les enlèvements. La police locale a quant à elle démenti ces incidents et a déclaré que la situation était sous contrôle. C’est pourtant cette situation préoccupante qui pousse certains réfugié·e·s, déjà très vulnérables, à le devenir encore plus en cherchant à fuir le Bangladesh pour l’Indonésie sur des embarcations de fortune.
- « The Night government expands it violent reach in Rohingya camps », publié le 30/03/2024 par The New York Times (quotidien new-yorkais distribué internationalement)
| 27/04/2024
Expérience interactive : vivre comme un·e réfugié·e en Australie.
Australie. A l’ouest de Sydney, le camp Refugee Camp In My Neighborhood (RCIMN) permet aux visiteur·euse·s de se glisser dans la peau des réfugié·e·s. Cette visite interactive, conçue par des réfugié·e·s et des demandeur·euse·s d’asile, montre les dures réalités de la fuite d’un pays, du voyage périlleux en bateau à la vie dans un camp de détention. L’expérience commence par une simulation de fuite, où les participant·e·s doivent choisir rapidement cinq objets essentiels à emporter. Ensuite, un·e « garde-frontière » impose des choix difficiles, symbolisant les sacrifices nécessaires pour espérer une vie meilleure. Puis, les guides, qui sont d’ancien·nne·s réfugié·e·s, partagent leurs récits poignants. Les visiteur·euse·s découvrent également les conditions précaires des camps : toilettes rudimentaires, rations alimentaires limitées et soins médicaux insuffisants. Ahmed, qui a passé plus de 7 ans dans un camp de réfugié·e·s égyptien, décrit la propagation des maladies et la souffrance quotidienne. Le RCIMN offre, donc, une immersion bouleversante rappelant que la situation de réfugié·e·s n’est jamais un choix, mais une nécessité imposée par des circonstances tragiques.
- « What’s it like to flee your homeland? A ‘refugee camp’ in Sydney shows you », publié le 27/04/2024 par ABC News (chaine d’information australienne quotidienne)
| 15/02/2024
Augmentation des violences sexuelles à l’encontre des personnes migrantes
Mexique. Les personnes migrantes au nord du Mexique, à Matamoros, Reynosa et Piedras Negras, dénoncent une hausse de 70% de violences sexuelles aux médecins de l’organisation non gouvernementale Médecins Sans Frontières (MSF). Ces violences les exposent à des infections, des grossesses non-désirées, en plus d’effets graves sur leur santé mentale. MSF a identifié l’accès à des centres d’accueil fournissant des services médico-sociaux comme un levier clé contre la prolifération des violences. Pour cause, les auteurs de ces crimes profitent des moments de transit et de la mise à la rue des personnes migrantes pour passer à l’acte. A titre d’exemple, Sofía et Ligia, deux sœurs réfugiées honduriennes, témoignent d’un trajet de huit heures à pied pour joindre le centre d’accueil le plus proche qui acceptait de les prendre en charge. Les personnes migrantes restent dans les villes proches de la frontière américaine en attendant un rendez-vous pour pouvoir déposer leur demande d’asile aux Etats-Unis. C’est un processus qui se passe désormais via une application mobile. Cet effort rentre dans un projet d’externalisation des frontières sur lequel collaborent les États américain et mexicain depuis longue date. Mais l’attente provoquée par cette procédure prolonge le temps passé dans des conditions insuffisamment protectrices, par manque d’accès au centre. Sans un accès fiable à l’abri, des services d’hygiène ou de soins, ou à l’alimentation, au Nord du pays, cette attente contribue, selon MSF, à l’accroissement des violences sexuelles à l’encontre des personnes migrantes.
- « La salud de personas migrantes está gravemente afectada por aumento de secuestros y violencia sexual en el noreste de México », publié le 15/02/2024 par Médecins Sans Frontières (organisation non-gouvernementale humanitaire internationale)
| 03/04/2024
Necoclí et Turbo, les points de départ de la traversée du Darién
Colombie. Necoclí et Turbo, des villes côtières colombiennes proches de la frontière avec le Panama, sont devenues des nouveaux camps de migrants de fortune. Les migrant·e·s y attendent des jours, voire des mois, sur la plage lorsqu’ils n’ont pas les moyens de payer le transport par bateau qui leur permettra de traverser la mer jusqu’à l’endroit où commence la jungle du Darién. Dans une étude de terrain, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a souligné l’absence d’aide humanitaire dans ces zones d’encampement. Les migrant·e·s dorment dans des tentes ou en plein air, sans accès aux services de base. Human Rights Watch a également mené une enquête dans cette région et a constaté qu’il y avait eu des violences, des abus et des menaces à l’encontre de cette population de migrant·e·s, mais la justice colombienne n’a pas ouvert d’enquête pour identifier ces cas et les porter en justice. L’absence de réponse coordonnée par le gouvernement face une telle situation met en péril les migrants, la vie dans l’intempérie augmentant les risques de violences. Le gouvernement a exprimé son souhait d’ouvrir des centres d’accueil dans ces deux villes, mais pour l’instant aucun projet n’a été lancé.
- « CIDH advierte crisis humanitaria en Colombia por migrantes que intentan cruzar la selva del Darién », publié le 19/04/2024 par Los Angeles Times (journal quotidien américain privé)
- « Neglected in the Jungle. Inadequate Protection and Assistance for Migrants and Asylum Seekers Crossing the Darién Gap », publié le 03/04/2024 par Human Rights Watch (ONG internationale de défense des droits de l’homme)
| 18/04/2024
Démantèlement de deux campements liés au trafic de personnes migrantes
Panama. Lors d’une opération militaire, deux camps liés au trafic de personnes migrantes ont été démantelés à Puerto Obaldía, une ville située au milieu de la jungle du Darién. L’opération a été menée par des brigades de lutte contre les stupéfiants et de protection des frontières (Senafront). Au cours de l’opération, 19 tentes en bois et en feuilles de palmier ont été découvertes, ainsi que du matériel de réfrigération, des générateurs électriques à carburant, des dispositifs de diffusion de signaux wifi et des armes de chasse. Senafront a signalé que des substances illégales étaient également vendues dans ces camps. La traversée du Darien devient une industrie migratoire très rentable pour les groupes armés qui proposent ce genre de zones d’encampement. Les groupes armés qui proposent ces services demandent des sommes astronomiques pour l’accès aux services de base. Par exemple, dans ces lieux, une assiette de riz et de poulet peut coûter jusqu’à dix dollars. Malheureusement, de nombreux migrant·e·s préfèrent faire l’effort financier et payer pour rester dans ces camps parce que c’est la seule option qu’ils ont pour éviter de passer la nuit dehors. Cela leur garantit une certaine sécurité, face au manque d’infrastructures que l’aide humanitaire devrait fournir.
- « Desmantelan campamentos vinculados al tráfico ilícito de migrantes », publié le 18/04/2024 par En Segundos (journal en ligne panaméen privé)
- « Campamento ofrecía wifi y carga de celular a migrantes en plena selva », publié le 18/04/2024 par Panama America (journal quotidien panaméen privé)
| 05/04/2024
Le football comme outil d’intégration dans le camp de Kakuma
Kenya. Le camp de réfugié·e·s de Kakuma, au Kenya, abrite près de 275 000 personnes, dont une majorité de jeunes. Le camp compte 26 équipes de joueurs et joueuses professionnel·le·s, ainsi que des centaines d’équipes amateurs. Dans ce contexte, le football est devenu le loisir le plus populaire, faisant désormais partie intégrante de la vie du camp.
Plusieurs initiatives ont été mises en place pour promouvoir cette pratique : l’agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le gouvernement du comté de Turkana ont organisé un tournoi interscolaire de haut niveau, le « Festival de football de Kakuma pour les écoles », coïncidant avec la Coupe d’Afrique des Nations. A cela s’ajoutent des ONG internationales et associations locales, à l’image de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) Sport pour le développement en Afrique qui a formé plus de 50 professeur·e·s de sport et entraîneur·euse·s communautaires. De son côté, la Fédération Kényane de Football a intégré l’approche « Sport pour le Développement » (S4DA), visant à prévenir la violence par le sport, à travers la formation de ses coachs, et la mise en place d’un quota lié au genre. A ce titre, et afin d’encourager la participation des filles, la Ligue de football pour filles a été créée en 2017. L’organisation Faulu Production organise quant à elle des tournois de football pour promouvoir la coexistence pacifique entre les différentes communautés. Cependant, le manque d’équipements et d’espaces de jeu, souvent sacrifiés au profit de la construction de nouveaux logements, entrave la professionnalisation des joueur·euse·s.
- « Grâce au football, des jeunes réfugiés vivent leurs rêves dans le camp de Kakuma, au Kenya », publié le 05/04/2024 par UNHCR (plateforme d’informations de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés)
- « Peace promotion and violence prevention through sport in forced displacement settings », publié le 01/01/2019 par GIZ (Agence de coopération allemande pour le développement)
- « Stories That Move. Sport for Development in Africa », publié le 01/05/2019 par GIZ (Agence de coopération allemande pour le développement)
- « Sports have long-lasting impacts on young refugees », publié le 05/04/2024 par UNHCR (plateforme d’informations de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés)
| 16/04/2024
Guerre au Soudan, crise humanitaire au Tchad
Tchad. Depuis le début de la guerre au Soudan, il y a un an, plus de 600 000 soudanais·e·s sont allé·e·s trouver refuge au Tchad pour fuir les combats. Depuis lors, une crise humanitaire s’enlise à la frontière tchado-soudanaise. Avec la progression du conflit, les ressortissants des deux Etats subissent les conséquences de la crise. Si les premiers réfugié·e·s arrivé·e·s au Tchad fuyaient les combats, les récentes arrivées sont généralement causées par la faim, du fait du pillage des campagnes soudanaises par les milices janjawids. Les espaces frontaliers avec le Tchad, comme la ville d’Adré, font alors face à une forte pression sur le plan alimentaire. Dans un premier temps, beaucoup de réfugié·e·s soudanais·e·s revendent leurs rations, obtenues auprès du PAM, sur le marché local pour pouvoir acheter des compléments alimentaires nécessaires. Cela a alors provoqué une explosion des prix sur le marché, privant plusieurs familles tchadiennes d’un accès aux produits essentiels de la vie quotidienne comme l’eau ou encore le carburant. De plus, le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire s’est multiplié dans la région et le nombre de personnes nécessitant une aide d’urgence a augmenté. Par exemple, le nombre d’enfants en situation de malnutrition, notamment tchadiens, a explosé, ajoutant une pression supplémentaire sur le dispositif humanitaire, déjà sous financé dans le contexte de crise.
- « Au Tchad, les réfugiés soudanais racontent qu’au Darfour », publié le 16/04/2024 par Le Monde (média français d’information générale)
- « Au Tchad, des réfugiés soudanais en proie à la famine », publié le 14/04/2024 par La Croix (quotidien national français)
- « La crise soudanaise fait monter en flèche les déplacements, la faim et la malnutrition dans la région », publié le 19/02/2024 par ONU Info (plateforme d’information de l’Organisation des Nations Unies)
| 22/04/2024
Kakuma: un écosystème entrepreneurial vert porté par les réfugié·e·s
Kenya. Le camp de réfugié·e·s de Kakuma, situé au Kenya, abrite près de 275 000 personnes, dont une majorité de jeunes. Ce camp compte une entreprise de recyclage communautaire, Fraternité pour un Développement Intégré (FRADI), dirigée par Raphaël Basemi, une personne réfugiée arrivée au camp en 2009. Ainsi, plus de 500 emplois pour les réfugié·e·s et la communauté locale ont été créés par l’entreprise, contribuant ainsi à la préservation de l’environnement. Soutenus par le gouvernement du comté et le département des services aux réfugiés du Kenya (DRS), le camp de Kakuma ainsi que la zone d’installation voisine de Kalobeyei se sont vus attribuer des centres de collecte de plastique sur leur territoire. L’agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a contribué à l’ouverture d’une boutique dans le centre d’incubation, où sont vendus des articles fabriqués à partir du plastique recyclé.
Grâce à la nouvelle Loi relative aux réfugié·e·s adoptée en 2021 par le gouvernement kenyan qui promeut leur inclusion économique et un meilleur accès à l’emploi, la FRADI a pu nouer des partenariats avec de plus grandes entreprises de recyclage, avant d’étendre ses activités à la gestion des déchets solides comme les os, le verre, le métal et les déchets organiques, contribuant ainsi à l’assurance d’un environnement plus sain pour ses résident·e·s. Cette initiative illustre la capacité des réfugié·e·s à être des « acteurs positifs et économiquement actifs » comme le souligne Mohamed Shoman du HCR, et s’inscrit dans le contexte plus large de l’économie entrepreneuriale dynamique qui s’est développée au sein du camp de Kakuma.
- « Un réfugié congolais transforme les déchets plastiques en une activité rentable », publié le 22/04/2024 par l’UNHCR (plateforme d’informations de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés)
- « Kenya : Kakuma, le camp de réfugiés aux 2 100 entreprises », publié le 27/06/2018 par Le Monde (média français d’information générale)
| 26/04/2024
La Banque de développement allemande finance une nouvelle installation sanitaire dans le camp de Rhino en Ouganda
Ouganda. Le Ministère de l’Eau et de l’Environnement ougandais a mis en service fin avril une installation sanitaire dans le camp de Rhino, au Nord du pays. Construite sur la base du Fonds de développement de l’eau et de l’assainissement Nord (WSDF-N) et d’un financement de la banque de développement allemande, KFW, le dispositif entend améliorer les conditions d’hygiène dans le camp de Rhino, le camp voisin d’Omugo ainsi que dans les districts alentours de Madi-Okollo et Terego. Visant une population totale de 276 792 personnes, l’installation a pour objectif de garantir l’élimination des déchets ainsi que des boues fécales qui s’accumulent dans le camp. En effet, la plupart des latrines présentes étant construites pour un usage temporaire, les populations sont contraintes de creuser régulièrement des trous, qui se multiplient entre les habitations. La promiscuité de celles-ci entraîne la propagation de maladies, notamment le choléra, qui affectent les réfugié·e·s vivant sur place. Le projet s’inscrit aussi dans une vision de long terme du gouvernement ougandais à destination des communautés réfugié·e·s et déplacé·e·s sur son sol. Depuis 2019, l’Etat ougandais, soutenu par la Banque Mondiale, avait déjà rassemblé des millions de dollars, de la part des bailleurs de fonds, pour renforcer ses systèmes d’eau et d’assainissement nationaux, en mettant en place des projets similaires.
- « Govt commissions Shs2.3b sanitation facility in northern Uganda’s refugee settlement », publié le 26/04/2024 par Daily Monitor (quotidien ougandais à diffusion nationale)
- « From a Humanitarian to Development Approach: Uganda’s Groundbreaking Journey in the Sustainable Provision of Water to Refugees and Host Communities », publié le 11/04/2024 par Relief Web (le portail d’informations humanitaires de l’OCHA)
| 18/04/2024
Qu’advient-il des habitant·e·s de Zaatari depuis la diminution de leur assistance ?
Jordanie. Du fait de la “fatigue des donneurs” accablant les réfugié·e·s syrien·ne·s, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a dû réduire à plusieurs reprises son assistance alimentaire et financière au cours des années et mois écoulés. Parallèlement, les autorités jordaniennes ont restreint l’accès aux permis de travail pour les Syrien·ne·s. Une situation qui pèse particulièrement sur Zaatari, le plus grand camp du pays. Marwan, réfugié syrien du camp et interrogé par Syria Direct, exprime sa frustration face à la réduction de l’aide. Alors qu’il vient de percevoir ses 21$ mensuel, il témoigne d’un sentiment palpable de désespoir parmi les résidents du camp, à l’image de Dalal Ismail Askar, âgée de 70 ans, également citée par le journal. Dalal, qui est la seule responsable de ses enfants adultes handicapés et ses deux filles adolescentes, raconte avoir fondu en larme en constatant le peu de courses qu’elle avait pu ramener au foyer après avoir dépensé l’allocation du mois.
Les petits entrepreneurs le long du « Sham Elysées », l’avenue du camp dédiée au commerce informel, rapportent une baisse significative des affaires par rapport aux années précédentes. Tout l’écosystème économique de Zaatari souffre en raison de la réduction des injections financières et de l’aide humanitaire. La réduction de l’aide affecte non seulement la sécurité alimentaire mais oblige également les familles à adopter des “stratégies d’adaptation négatives” comme s’en inquiète le PAM. L’organisme constate une augmentation du travail des enfants, parfois des moins de 13 ans qui contribuent au revenu de leur famille, comme par exemple en collectant des déchets recyclables revendus au kilo. Cette situation souligne le désespoir qui a enveloppé le camp, poussant les résident·e·s vers des pratiques insoutenables et parfois nuisibles sur le long terme.
- « Jordan calls for continued support for Syrian refugees on its territory », publié le 18/04/2024 par Enab Baladi (média indépendant de l’opposition syrienne)
- « Aid cuts leave Ramadan tables sparse in Jordan’s Zaatari camp », publié le 05/04/2024 par Syria Direct (organisation indépendante de journalistes syriens)
- « Tight funding forces WFP to reduce food assistance for Syrian refugees in Jordan, including in camps », publié le 18/07/2023 par le Programme alimentaire mondial (Programme Alimentaire Mondial de l’ONU)
| 23/04/2024
El País réalise un reportage inédit sur le camp de Ein el-Hilweh au Liban
Liban. C’est le plus grand camp de réfugié·e·s palestinien·ne·s du Liban, avec 60 000 résident·e·s. Situé au sud de Saïda, dans le sud du pays, il abrite également environ 19 000 réfugié·e·s syrien·ne·s arrivé·e·s plus récemment. Le journal espagnol El País a publié le 23 avril un reportage écrit illustré de photos réalisé à Ein el-Hilweh, à l’aune de la guerre qui ravage la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023. Le camp d’Ein el-Hilweh est lui-même fréquemment secoué par des affrontements entre différentes factions. La dernière a eu lieu durant l’été 2023, après le meurtre en juillet du général Abou Ashraf al Armoushi, haut responsable du Fatah, et a causé la mort de onze civil·e·s. Si depuis le 7 octobre, les différents groupes ont déposé leurs armes, encouragés à le faire par le gouvernement libanais, les habitant·e·s du camp, qui suivent la situation de Gaza de très près, craignent qu’un éventuel cessez-le-feu aboutisse chez eux à une reprise des combats.
En juillet dernier, Hussein Almeari, un charpentier né dans le camp, et sa famille, ont quitté leur domicile. À leur retour en octobre, ils ont retrouvé leur foyer, qui était situé à un carrefour stratégique entre plusieurs quartiers, presque détruit, avec de nombreux impacts de balles. Les écoles de l’UNRWA ont aussi été occupées et gravement endommagées. Dorothée Klaus, directrice de l’UNRWA au Liban, a déclaré à El País : « Notre réaction par le passé a été de renforcer les bâtiments pour protéger les enfants, mais cela a eu l’effet inverse et a transformé les écoles en zones propices aux opérations militaires. »
- « The future of Ein el-Hilweh, the massive Palestinian refugee camp in Lebanon whose fate is linked to Gaza », publié le 23/04/2024 par El País (site d’information espagnol)
- « Camp d’Ein El Hilweh », publié le 01/05/2020 par le site de l’Observatoire des Camps de Réfugié·e·s (O-CR)
| 23/04/2024
Un incendie ravage le camp syrien de Hamed el-Hassan
Liban. Il ne reste plus grand-chose du camp de réfugié·e·s syrien·ne·s de Hamed el-Hassan, situé près de la ville libanaise de Zahle, dans la Bekaa. Abritant environ 480 personnes d’après une résidante citée par L’Orient-Le Jour, le camp informel a été touché le 22 avril par un incendie qui s’est rapidement propagé à l’ensemble des 6000 mètres carrés du camp, mais n’a pas fait de blessé·e·s en dehors de plusieurs évanouissements. D’après le responsable local de la Défense civile, Fayez el-Cheïyyé, dont l’équipe est venue éteindre l’incendie, également cité par L’Orient-Le Jour, les matières facilement inflammables présentes dans les tentes et le fait que celles-ci étaient très rapprochées ont permis cette propagation rapide du feu. Il a indiqué par ailleurs à The National, un quotidien anglophone émirati, que l’incendie pourrait avoir été causé par une étincelle électrique.
Les habitant·e·s ont rapidement été évacué·e·s et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR), dont les bureaux sont proches du camp, a annoncé chercher un lieu pour mettre à l’abri les sinistré·e·s n’ayant pas de solution d’hébergement de secours. Nombre d’entre elleux espèrent pouvoir reconstruire le camp, malgré le climat de plus en plus antisyrien qui règne au Liban, où les autorités envisagent un renvoi des ressortissant·e·s syrien·ne·s et où les attaques contre elleux se multiplient. Une commerçante voisine du camp a affirmé à L’Orient-Le Jour : « Il fallait voir combien sont sortis de là… Cela montre qu’ils sont beaucoup trop nombreux… » De son côté, Mohsen el-Zein, l’agriculteur chargé par le propriétaire du terrain de collecter les loyers auprès des réfugié·e·s, a affirmé vouloir aider ces derniers.
- « Sous les cendres du camp de réfugiés de Hamed el-Hassan, l’angoisse de la double peine », publié le 23/04/2024 par L’Orient-Le Jour (quotidien francophone libanais)
- « Zahle fire: Syrian refugee camp in Lebanon gutted by blaze », publié le 22/04/2024 par The National (quotidien anglophone émirati)
| 24/04/2024
Raid israélien meurtrier dans le camp cisjordanien de Nour Chams
Cisjordanie. Treize Palestien·ne·s ont été tué·e·s durant une opération de plus de cinquante heures menée par l’armée israélienne dans le camp de réfugié·e·s de Nour Chams, situé près de Tulkarem, au nord de la Cisjordanie. Le 18 avril, les forces israéliennes ont commencé par couper l’eau et l’électricité avant de pénétrer avec des bulldozers dans le camp. Durant les affrontements, dix des Palestiniens tués étaient des combattants d’après l’AFP et Le Monde, toutefois le journal The Times of Israel cite le chiffre de quatorze combattants. D’après un résident du camp de Nour Chams, son fils de quinze ans, nommé Jehad, a été tué à bout portant après que des soldats lui ont demandé de sortir de chez lui. Des photos montrant le corps de Jehad avec une balle dans la tête ont été partagées par des voisins témoins à l’AFP. Les autorités israéliennes ont par ailleurs annoncé l’arrestation de quinze personnes et avoir recensé dix soldats blessés, selon The Times of Israel. Le 21 avril, une procession funéraire a été organisée, à laquelle ont assisté des militants qui ont tiré en l’air afin de rendre hommage aux défunts et placé des drapeaux du Hamas et du Jihad islamique sur les dépouilles. Des habitant·e·s ainsi que des forces civiles palestiniennes ont aussi commencé à réparer des infrastructures endommagées et à dégager les gravats. Pour certain·e·s résident·e·s du camp, ce nouvel épisode de violence a été particulièrement choquant.
« J’ai eu tellement peur. Je n’avais jamais vu autant de violence, » a raconté Hamde Abdallah Sarhan, une Palestinienne de 85 ans, à l’AFP. Hamde a été victime d’une incursion de soldats qui ont percé un trou dans l’un de ses murs afin de pouvoir l’utiliser comme fenêtre de tir.
Le Monde rapporte, photo à l’appui, que l’un des soldats israéliens ayant participé au raid meurtrier dans le camp de Nour Chams, a inscrit une étoile de David accompagnée de la date « 7.10 » dans une des maisons du camp. Selon le ministère de la santé palestinien, 487 Palestinien·ne·s ont été tué·e·s et 4900 blessé·e·s par des soldats ou colons israéliens depuis le 7 octobre 2023, dans le camp de Nour Chams.
- « Israeli raid leaves grief-stricken families, devastation in Nur Shams refugee camp », publié le 22/04/2024 par Al Arabiya (site d’information en ligne saoudien)
- « IDF wraps up 50-hour operation in Nur Shams refugee camp: 10 soldiers hurt, 14 Palestinian gunmen killed », publié le 21/04/2024 par The Times of Israel (média israélien en ligne)
- « En Cisjordanie, les méthodes brutales de l’armée israélienne face aux groupes armés palestiniens », publié le 24/04/2024 par Le Monde (média français d’information générale)
| 28/04/2024
Plus de 750 Irakien·ne·s du camp syrien d’Al Hol rapatrié·e·s en Irak
Syrie/Irak. Le camp d’Al Hol, situé dans le nord-est de la Syrie, près de la frontière irakienne, abrite plus de 43 000 déplacé·e·s venu·e·s principalement de Syrie et d’Irak, mais aussi de nombreux autres pays, et dont certain·e·s seraient des proches de membres de l’État islamique (EI). Il s’agit en majorité de femmes et d’enfants, qui y vivent sous des tentes dans des conditions très difficiles. Le camp d’Al-Hol est sous administration des Forces Démocratiques Syriennes (FDS), mais une partie du camp serait encore contrôlée par l’EI. Le 29 avril, les autorités irakiennes ont annoncé le rapatriement de plus de 700 de leurs ressortissant·e·s, qui étaient confiné·e·s à Al-Hol depuis des années. Ils et elles ont été transféré·e·s dans le camp de réhabilitation de Jeddah, au nord de l’Irak, dans lequel leurs liens éventuels avec l’organisation djihadiste devaient être évalués. D’après les autorités irakiennes, l’objectif est qu’ils et elles puissent ensuite regagner leurs localités d’origine. Il s’agit de la dernière vague d’Irakien·ne·s rapatrié·e·s depuis Al Hol de cette manière, plus de 8000 l’ayant été jusqu’ici d’après le média syrien Enab Baladi. Mais ce retour de proches de membres de l’EI ne fait pas l’unanimité parmi la population et la classe politique irakienne, dont une partie les perçoit encore comme une menace.
- « 700 irakiens quittent le camp d’Al-Hol en Syrie pour retourner dans leur pays », publié le 29/04/2024 par RTBF Actus (site d’informations de la Radio-télévision belge de la communauté française)
- « Près de 750 Irakiens rapatriés vers leur pays depuis le camp syrien d’al-Hol », publié le 30/04/2024 par RFI (station de radio publique française à diffusion internationale)
- « Iraq recovers more than 700 citizens from al-Hol camp in Syria », publié le 28/04/2024 par Enab Baladi (site d’information syrien indépendant basé hors de Syrie)
| 29/04/2024
L’Irak ferme l’ensemble de ses camps, à marche forcée
Irak. Le ministère irakien de la Migration et des Déplacements a annoncé la fermeture du camp de Tazade pour déplacé·e·s internes le 19 mars dernier. Ces dernières années, les déclarations laconiques des autorités indiquant des fermetures de camp se sont multipliées, de même que les témoignages d’organisations humanitaires et de travailleurs des camps, qui dénoncent des opérations précipitées et chaotiques. Nombre de ces camps regroupaient des déplacé·e·s, ayant fui les combats contre l’Etat Islamique. Des observateurs tels que Human Rights Watch notaient déjà en 2021 une application sélective des législations en vigueur prévoyant la protection des déplacé·e·s par les combats, selon que les familles étaient ou non suspectées de sympathie envers l’Etat Islamique. Cette ségrégation a particulièrement touché les familles expulsées lors des fermetures de camps, qui auraient dû être accompagnées pour retrouver un logement, en théorie.
Le gouvernement semble suivre un plan de fermeture de tous les camps du pays, appliqué avec constance depuis l’approbation en mars 2021 d’un texte allant dans ce sens, proposé par les ministères de la Planification et de la Migration et des Déplacements. En décembre 2022 ce dernier a même déclaré avoir fermé avec succès l’ensemble des camps de déplacé·e·s internes placé·e·s sous son autorité. Dans les faits, les sites encore ouverts sont simplement devenus des camps informels, abandonnant de ce fait les habitants à leur sort, sans assistance. Le gouvernement autonome de la région du Kurdistan Irakien a reçu fin janvier l’ordre de fermer tous ses camps d’ici au 30 juillet 2024. La région compte encore plus de 600 000 déplacé·e·s réparti·e·s sur 23 sites. Si dans un premier temps, les autorités d’Erbil se sont activées pour accéder à cette demande, elles ont rapidement constaté leur incapacité à tenir les délais via des programmes de volontariat. Elles ont finalement envoyé un refus à Bagdad, indiquant qu’elles ne souhaitaient pas recourir à des expulsions forcées. Bagdad, inflexible, a lancé en mars des poursuites contre les autorités du Kurdistan. La Cour Suprême fédérale d’Irak devra se prononcer quant à “l’inaction” d’Erbil dans la politique de fermeture des derniers camps en Irak.
- « Iraq: Closing Tazade Camp in Sulaymaniyah », publié le 19/03/2024 par Iraqi News Agency (agence de presse publique irakienne)
- « Réhabiliter des logements en Irak pour renforcer la résilience des personnes déplacées du camp de Latifiyah », publié le 29/04/2024 par Première Urgence Internationale (ONG française de solidarité internationale)
- « Baghdad takes KRG to court over closing IDP camps », publié le 29/03/2024 par Rûdaw (média kurde irakien multilingue)
- « Iraq: Inadequate Plans for Camp Closures », publié le 29/06/2021 par Human Rights Watch (ONG internationale de défense des droits de l’homme)